Le sacre du printemps - Igor Stravinsky
- vnicolemusique
- 27 oct. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 nov. 2023
Le sacre du printemps - Igor Stravinsky

En ce soir de Mai 1913, la salle du théâtre des Champs Elysées est illuminée de mille feux. C'est la première d'une nouvelle création du compositeur Russe Igor Stravinsky ( 1882-1971 °. C'est un ballet.
La troupe de Serge Diaghilev est à paris depuis quelques jours et son danseur vedette Nijinsky, est la personne qu'il faut croiser. Les Ballets Russes sont très célèbres dans l'Europe entière. Leur façon de danser est totalement nouvelle. Les danseurs et les danseuses viennent des théâtres impériaux russes. Ils trouvent à Paris leur consécration mondiale. Leur impresario est Serge Diaghilev. Il sait s'entourer des grands chorégraphes, tel que Fokine. Pour Diaghilev l'art de la danse doit être un spectacle total. Argument, décor, costumes, musique continuent u n ensemble esthétique qui forme le ballet. Diaghilev veut faire éclater les cadres de la danse pure et la mélanger avec les autres arts. Le ballet devient la synthèse des tous les moyens d'expression, musique, poésie, art dramatique, arts plastiques. Cette réforme du ballet ne sera possible que grâce à la culture de Serge Diaghilev qui en mélangeant les époques, les styles, les arts des différents pays influencera l'art moderne. La culture tombe dans le domaine du public: les femmes cherche les motifs vus sur les costumes et les intégrer dans leur garde-robe. L'orientalisme très à la mode à cette époque s'invite dans les foyers de la bonne société et influence les artistes de l'époque. Diaghilev est aussi un merveilleux découvreur de talent .
La bonne société se presse donc ce soir du 29 mai. Il se dit que ce Sacre du Printemps est un nouveau mode d'expression de la musique moderne.
Ce soir de première, la foule se presse pour entrer dans le théâtre. Les femmes ont sorti leurs plus belles robes et les messieurs leurs costumes . Il n'est pas rare de croiser des princesses russes célèbres qui viennent retrouver un peu du faste de Saint-Pétersbourg. Enfin, la salle est comble. Le bruit se calme enfin.
Igor Stravinsky, le compositeur et chef d'orchestre se concentre dans les coulisses. Il sait que son œuvre va changer le cours de l'histoire de la musique. Il y aura un avant et un après du Sacre. Les répétitions ont été un peu difficiles. Certains danseurs ont eu du mal avec la rythmique de certains passages. Pour d'autres, les costumes, les décors les ont déconcerté. Mais dans l'ensemble, et grâce à Nijinsky, qui est pourtant exigeant, tout s'est bien terminé.
L'orchestre est installé dans la fosse d'orchestre. Le hautbois donne le la à tous les autres musiciens. L'accord doit doit être impeccable.
Les lumières de la salle s'éteignent. Stravinsky respire, se redresse. Pierre Monteux, le chef d'orchestre entre, le public applaudit. Il salue , se tourne vers les musiciens, lève sa baguette. Le son du hautbois résonne dans la salle. les rideaux s'ouvrent.
Le Sacre peut commencer.
Le résultat n'est pas celui attendu par le compositeur. Le public ne comprend pas tout à cette nouvelle musique. La création du Sacre va créer un énorme scandale. Le public siffle, s'invective. Certains ne comprennent pas la danse ni la musique. D'autres sont debout pendant l'exécution tellement la rythmique les attirent.
C'est une œuvre hors de l'histoire et des genres musicaux. Le Sacre est une nouvelle vision musicale :
c'est une " création" au sens le plus étroit du mot. Stravinsky ne va pas s'inspirer de la Russie au sens propre; La plupart des thèmes entendus sont totalement créés par le compositeur. Il veut donner une certaine idée de la Russie, la sienne, qu'il va déformer pour arriver à montrer son archaïsme.
La rythmique du Sacre est trop nouvelle pour que les jeunes compositeurs s'en inspirent vraiment. pourtant ,ils savent qu'ils ne pourront plus écrire de la musique comme avant . La forme primitive de ce rythme est très forte et entraine l'auditeur vers des contrées trop lointaines et méconnues, l'Afrique par exemple.
Il n'en reste pas moins vrai que le Sacre du Printemps reste l'oeuvre la plus novatrice de ce début de siècle. Sa force primitive, son rythme trépidant attire immédiatement l'attention de tous les contemporains de Stravinsky.
En 1965, Maurice Béjart, chorégraphe mondialement connu, s'attaque au Sacre. Comme la première fois qu'il a été donné, le Sacre déclenche un raz de marée. Béjart reste dans la lignée du maitre et des chorégraphe du début de siècle. Il va encore accentuer le décalage avec le ballet classique : plus de décors, plus de costumes. Juste des collants couleurs chairs et des juste au corps. Les postures reprennent celles de Nijinsky. Les puristes du ballet classique n'en croient pas leurs yeux. Ils ne comprennent rien à ce qui se déroule . Plus de code, plus de postures classiques. C'est un feu d'artifice mêlant la musique à la danse. Le début du monde. Sans rien de plus.
Les réactions sont sans mesure: on adore ou on déteste. Aujourd'hui encore, cette mise en scène du ballet du Sacre reste la référence. Maintes fois reprise dans les postures des danseurs et de la mise en scène.
En conclusion, laissons la parole à Pierre Boulez, directeur de l'IRCAM , chef d'orchestre et compositeur dans son livre Relevés d'apprenti, édition du Seuil, Paris, 1966 :
" Remarquons qu'il est peu d'œuvres au cours de l'histoire musicale à pouvoir se targuer d'un tel privilège : n'avoir pas quarante ans après, son potentiel de nouveauté épuisé . Disons qu'ici cette nouveauté est sur le plan unique, celui du rythme : mais même avec cette restriction, cela représente une somme d'invention et une qualité dans la découverte fort enviables . "
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